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dessous les roses 1L'avis d'Adrien :

Trois ans après l’épatant « Une partie de badminton », on retrouve l’alter ego d’Olivier Adam, un certain Paul, toujours un peu le même, toujours un peu différent. Il aici les traits d’un Edouard Louis cinéaste. Olivier Adam ne s’empêche pas d’écorcher, avec nuances of course, ce transfuge de classes qui semble étriller sa famille sans trop de scrupules.

« Dessous les roses » c’est la réunion d’une tribu pour l’enterrement du père car comme le disait Michel Audiard, « c'est le sort des familles désunies de se rencontrer uniquement aux enterrements ». Chacun retrouve vite sa place, l’aînée qui a dû essuyer les plâtres et passer l’éponge sur tout avec une bienveillance sans failles, le cadet, Paul, vilain petit canard qui fuit son milieu tout en y revenant toujours, et le petit dernier qui a eu tous les droits et a des difficultés à comprendre son frère qui crache dans la soupe à tout va.
Ça démarre en douceur et avec (un peu trop) de légèreté et ça finit par nous cueillir, avec sa mélancolie, son humour, son acidité, car même dans une famille formidable on se rend parfois compte qu’en dépit de la même éducation, on finit par avoir peu de points communs avec ses frères et sœurs avec lesquels on a pourtant vécu une bonne partie de l’enfance.btn commande

Famille je vous aime, famille je vous hais, un microcosme toujours fascinant qu’Olivier Adam croque à merveille !

Flammarion, 21 €

les exportsL'avis d'Adrien :

Enquête hallucinante sur l’exportation des juifs de Roumanie par l’Etat roumain contre du bétail et principalement contre des porcs.

La famille maternelle de Sonia Devillers fit partie de cet échange nauséabond et improbable et a toujours gardé ce fait confidentiel. Sonia Devillers, la journaliste média de France Inter, retrace l’histoire de la population juive en Roumanie ainsi que l’histoire toute personnelle de sa famille traversant le XXe siècle. Elle nous montre comment la Roumanie fasciste a mené sa Shoah avant la Shoah et comment par la suite, la Roumanie communiste a organisé un juteux trafic d’export avec sa population juive.
On y rencontre notamment un troublant personnage, l’ambivalent passeur et fournisseur de bétail Henry Jakober qui a été l’unique intermédiaire avec le Ministère de l’Intérieur roumain durant toutes les années qu’a duré cette véritable traite d’êtres humains.

Il s’agit là tout à la fois d’un récit historique, journalistique et intime brillant et touchant d’un scandale méconnu. btn commande

Flammarion, 19 €

enfants endormisL'avis de Maryse:

Dans ce premier roman pour le moins percutant, Anthony Passeron déploie, avec un courage certain, son histoire familiale. Celle de ses grands-parents d’abord, des bouchers d’origine italienne, entrepreneurs dans une bourgade montagneuse de l’arrière-pays niçois, bien prospères durant les Trente Glorieuses. Ensuite, celle de la génération qui les a suivis et du fossé immense qui s’est creusé entre eux. Son père, qui a loyalement repris l’affaire familiale à l’époque où s’amorçait la désertification des campagnes. Et surtout son oncle Désiré, le premier de la lignée à décrocher le bac, l’ainé, la fierté de la famille, l’employé administratif, le joyeux et populaire fêtard des bars branchés de Nice, celui qui a finalement brûlé la chandelle par les deux bouts dans les bas-fonds de la cité balnéaire, et est devenu héroïnomane.

L’écrivain alterne de manière équilibrée deux récits. D’une part, il raconte l’histoire, intime et poignante, de l’addiction et de maladie de son oncle atteint du sida dans les 1980, à l’aube de la tragique pandémie, alors qu’on en avait reçu que le lointain écho dans cette région si reculée de l’Hexagone. C’est aussi l’histoire bouleversée d’une famille entière, tantôt fermement déterminée à soutenir le malade dans ses nombreux traitements, à affronter ses démons, à assumer ses choix avec une attitude combattive, tantôt murée dans le déni et le silence alors même que l’homme chute irrémédiablement vers la mort.

D’autre part, on lit le récit sociologique, documenté et fourni, de la recherche menée sur le virus du sida en France. Depuis ses balbutiements face à la méconnaissance totale de la maladie, les incroyables difficultés pratiques, scientifiques, statistiques et parfois commerciales auxquelles elle s’est heurtée, les impasses dans lesquelles elle s’est engouffrée, ses réussites aussi – en dépit des innombrables destinées brisées – jusqu’à la fin des années 1990.

Cette lecture secoue. Elle ouvre les yeux, si besoin en est, sur cette funeste réalité qu’a été – et qu’est toujours bel et bien – le sida en France. Avec érudition, Anthony Passeron remet en lumière toute une époque, les rouages de la lutte contre cette maladie alors considérée honteuse, ainsi que le traitement politico-médiatique qu’on lui a consacré à l’époque. Mais avant tout, par ce roman, l’écrivain rend un hommage intime, pudique et touchant à sa famille brisée par l’incompréhension, la désillusion, la marginalisation, la solitude et le chagrin. Quelque part, Les enfants endormis réhabilite la mémoire de Désiré et au-delà, celle des nombreuses victimes du VIH, hier, aujourd’hui et demain.

Éditions Globe, 20 €btn commande.