librairie
point virgule

Rue Lelièvre, 1 B-5000 Namur | Tél. : +32 (0)81 22 79 37 | info@librairiepointvirgule.be | Du lundi au samedi de 9h30 à 18h30

le cas davidL'avis d'Adrien :

Du suspens fantastique vertigineux !

David Zimmerman, jeune photographe peu sociable, taciturne, se voit entraîner dans une énorme fête de réveillon par son unique ami, le fanfaron Harry. David va tomber en pâmoison devant une intrigante convive qu’il va suivre dans un endroit plus intime. Le lendemain de leurs ébats, David se réveille chez lui, dans le corps de cette fille dont il ne sait rien. S’ensuivent des recherches acharnées, de son propre corps, des raisons, du pourquoi, du comment. Quelle est cette effrayante transsubstantiation ? Comment inverser le phénomène ? Comment vivre cette folie seul (ou presque, nous ne vous en disons pas davantage), car impossible à partager avec quiconque ?le cas david1

Le “bodyswap” (échange de corps) est un thème régulièrement traité dans le genre fantastique mais les frères Harari le traite d’une façon si réaliste que c’en est étourdissant. Les questions soulevées ne sont pas forcément celles évidentes du genre ou de la transidentité (non voulue ici) bien qu’elles soient inhérentes au projet. Sont plutôt abordés l’identité en tant que telle, la judéité aussi, ainsi que l’épigénétique, le passé jamais révolu - notre héros est photographe ne l’oublions pas, archiviste de la mémoire donc.

De Lucas Harari, nous avions déjà beaucoup aimé “L’aimant”, thriller architectural, eh oui !, se déroulant aux Thermes de Vals en Suisse, ainsi que “La dernière Rose de l’été”, polar ligne claire estival. Arthur Harari, le frère, nous avions pu l’admirer au cinéma en tant qu’acteur, scénariste ou encore réalisateur (dans le désordre : “Diamant noir”, “Anatomie d’une chute”, “Sibyl”, “Le procès Goldman”...). Les deux brillants frères s’associent et investiguent le fantastique qui fait frissonner et réfléchir. On retrouve aussi avec joie (et tressaillements) les ambiances, l’atmosphère créées par l’illustrateur tout en quadrichromie et ce genre de héros, artiste loser qui ne s’en laisse pas conter, l'architecture aussi, la ville très présente, un Paris comme on le voit peu. Les éditions Sarbacane ont une nouvelle fois soigné l’objet bd, dos toilé, très grand format, couverture frappante. Tout y est donc parfait et déstabilisant !

Sarbacane, 35 €btn commande

 

deux filles nuesL'avis d'Adrien :

Luz nous invite à découvrir les pires tourments, c’est un euphémisme, du siècle dernier à travers le regard d’une peinture, nous sommes littéralement dans les "yeux" de la toile, angle de vue original s’il en est.
Cette peinture c’est “Deux femmes nues” du peintre Otto Mueller, lié au mouvement expressionniste Die Brucke.
Rien ne nous échappe, dès que l'œuvre d'art surgit en 1919 des derniers coups de pinceaux de l'artiste. Peu après, accrochée dans le bureau d’un collectionneur juif, on observe la montée du nazisme sur des affiches de propagande collées sur les murs du trottoir d’en face, suivie des premiers passages à tabac et puis la violence finit par faire irruption dans l’intimité familiale du collectionneur.
La toile fera ensuite partie de l'exposition de l’Art dégénéré (Munich, 1937), exposition qui a eu bien plus de succès, faut-il le rappeler, que l’expo d’en face dédiée aux artistes avalisés par le IIIe Reich.
Elle sera retrouvée après le cauchemar de la Seconde Guerre Mondiale et finalement remise en 1999 à la fille de l’acheteur juif rencontré au début de l’histoire.
On y voit évidemment des moments bouleversants auxquels Luz arrive pourtant à apporter respiration et même quelques touches d’humour, il arrive aussi à être didactique sans l’appuyer, et il arrive peut-être surtout à montrer l’importance de l’art, son lien avec la politique et sa fragilité face aux idéologies fétides.

Albin Michel BD, 24.90 € btn commande

balladesL'avis d'Adrien ;

Attention, première bande dessinée, c’est virtuose et la virtuosité dans l’humour, c’est quelque chose.
Fendons-nous donc la poire en cotte de maille ! 👑🐸
Une bande dessinée ultra chamarrée, un trait à la rondeur affolante, un langage outrageusement médiéval, un défilé de grenouilles coassant à qui mieux mieux, on peut se demander où vont nous mener les premières pages de cette bande dessinée.
Et puis très vite, le charme opère. On se sent pris dans l’action avec le roi déchu, Gourignot de Faouët transformé en amphibien après un coup d’état fomenté par ses proches, avec la preuse chevaleresse Gounelle délivrant de sa tour, évidemment gardée par un dragon, la princesse à la peau d’albâtre, Patine, promise au roi.
Et on rit du langage qui se trouve être finement ciselé, des couleurs vives et pop qui vont à l’encontre de l’idée générale qu’on se fait du Moyen-Âge, des incursions décalées de nombreuses références pop (Yakalélo Yakalélo, "Estre grenouille libérée, sais-tu ce n'est point chose aiséééé"...).
C’est extrêmement bien fait, très inventif, plein de rebondissements, c’est une épopée enlevée, féministe, hilarante et sa lecture fait du bien ! Longue vie (et beaucoup de publications) à Camille Potte !
Et si d’aventure, vous souhaitiez approfondir l’époque médiévale en mode absurde, il se fait qu'un autre auteur de bd a été inspiré par le temps des Seigneurs cette année. Nous ne saurions trop vous recommander les "Chroniques du château faible" de Jean-Christophe Mazurie, album paru en février chez Fluide Glacial.

 

Atrabile, 22 euros.btn commande