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Ta promesse raconte de manière fort subtile les mécanismes de l'emprise à travers le récit d'une relation toxique.
Claire Lancel, écrivaine quinquagénaire renommée, tombe amoureuse de Gilles Fabian, homme de théâtre. Le couple, dont l'amour s'est soudé au-delà des expériences houleuses vécues respectivement par le passé, nage dans un bonheur épris de quiétude et de bienveillance. Les amants ne se promettent pas monts et merveilles, mais bien le respect de l'intégrité de chacun. C'est stable, c'est sain, bien que passionné. Toutefois, puisque, comme le dit Claire, "dans les livres, le bonheur lasse tout le monde", le lecteur attend la chute, annoncée par touches insidieuses, alors que l'atmosphère se tend doucement, en crescendo, jusqu'à l'asphyxie.
Et Camille Laurens de brouiller astucieusement les pistes entre le réel et la fiction, son personnage et elle-même - du moins ce que le public connaît d'elle-même - au point d'en troubler la lecture.
Dans ce roman, qu'on engloutit d'une traite, le métier à tisser la toile de l'ascendant psychologique fonctionne impeccablement, à l'instar des rouages aiguisés de l'écriture qui manoeuvre le lecteur tel un pantin.
Brillant.
Disponible en format numérique ici.
De l’amour et du réconfort, nous en avons tous besoin en cette époque de tumultes et d’incertitude, n’est-ce pas ? En voici donc.
C’est l’incroyable histoire (vraie !) de deux cigognes amoureuses, prénommées Rose et Noah. Un beau jour de migration, alors qu’elles volent ensemble vers les pays chauds, un coup de feu retentit… et Rose tombe au sol, blessée à l’aile. Un fermier et sa petite-fille la secourent mais, malgré leurs bons soins, elle ne pourra plus jamais voler. C’est donc le cœur en tristesse que Rose doit laisser partir Noah, qui ne peut vivre l’hiver sous des climats froids. Mais c’est sans compter sur la fidélité indéfectible de son amoureux qui, à chaque printemps et pendant des années, reviendra et sera au rendez-vous de sa Rose afin de passer la belle saison ensemble (et d’élever une tripotée de cigogneaux).
Inspirées de l’histoire vraie de deux cigognes qui, dans la Croatie des années 1990, avaient attiré l’attention du monde entier, Carol Joy Munro et Chelsea O’Byrne nous offrent un album enchanteur, sensible et doux, auquel les illustrations rétro confèrent un charme particulièrement délicieux.
Minedition, 15 euros.
À l'occasion de la parution de son premier roman, Sauve qui pique, qui vient de paraître aux éditions Oskar, nous accueillerons Amélie Dewez pour un atelier d'écriture destiné aux enfants de 8 à 12 ans. Cet atelier aura lieu le samedi 22 mars à 15h30 et sera suivi d'un goûter et d'une séance de dédicace.
Sauve qui pique est un roman virevoltant. On y suit les aventures de Romy, petite fille bouillonnante et malicieuse, lors de son premier camp louvette. Un camp qui s'annonce mal: sa meilleure amie ne sera pas de la partie, la grande cheffe est décidément toujours de mauvaise humeur. Alors Romy se renfrogne, se sent "chardon", solitaire. Les premiers jours sont difficiles, rien ne va.
Chaque année, les librairies Initiales décernent leur Prix Mémorable. Un prix en dehors des sentiers battus, qui met en avant notre goût de libraires pour les pépites et les projets éditoriaux singuliers. Au fil des années, la collection des Prix Mémorables dessine une jolie cartographie littéraire.
Suivez le guide!
Cette année, c'est Le ciel tombe de Lorenza Mazzetti qui reçoit le Prix Mémorable.
Le roman est publié en 1961 en Italie. Il s'inspire largement de l'enfance de son autrice, recueillie bébé avec sa sœur jumelle par son oncle et sa tante, suite à la mort en couches de leur mère. La famille vit en Toscane, dans un petit domaine à l'écart d'un village. Ce sont les dernières années du fascisme; la propagande à l’école et le poids du
La Villa domine le village. Il faut un cheval pour faire le tour du domaine tant il est vaste. Entre les murs, on parle l’italien et l’allemand, l’anglais et le français. Les invités se succèdent – artistes, excentriques, intellectuels. Le piano résonne, les livres sont partout, on joue aux échecs. Et le dimanche, seuls les domestiques se rendent à la messe du village.
La Villa est un îlot résolument à part dans la Toscane des années 30. La propagande fasciste n’y entre pas. On lui tient tête en parlant philosophie, culture, laïcité.
C’est dans cette villa, propriété de son oncle et de sa tante, que grandit la petite Penny. Elle et sa sœur Baby y ont été recueillies suite à la mort de leurs parents. L’oncle – Robert Einstein, un cousin d’Albert – est admiré et craint. Penny sait par le curé du village qu’il ira en Enfer, puisqu’il est Juif. Alors elle tente de lui acheter une place au purgatoire en inventant, pour elle, sa sœur et leurs amis, les fils et les filles des paysans du village, des séances de pénitence oscillant entre burlesque et tragique.
Penny est tiraillée entre deux mondes. À l’atmosphère feutrée de la Villa, elle préfère les jeux du dehors, la vie dans les arbres, les courses sans fin avec les enfants de métayers. Quand elle arrive à l’école dans l’unique voiture du village, conduite par un chauffeur en livrée, elle est la seule à porter un prénom étranger, la seule à ne pas sentir « le foin et le mouton ». Penny vénère sa maîtresse et plus encore le Duce et Jésus. Ces deux-là, elle les confond un peu, à force d’entendre parler de leurs hauts faits respectifs. Et puis il y a la Vierge, le Diable qui parfois prend la forme d’un coq et essaie de faire dégringoler le ciel aux enfers. Heureusement, les enfants sont là : « Il fallait qu’on lève les mains en l’air pour soutenir le ciel. Lea a entonné un chant, nous on avait toujours les mains en l’air, les visages rouges à cause de l’effort. Le ciel est sur le point de tomber, le ciel tombe, et nous on est là, avec les bras en l’air pour soutenir le ciel. (...) Qui nous aidera ? ». Entre la Villa et le village, comment trouver une place ?
Le ciel tombe raconte au plus près l’enfance de Penny. Tour à tour effrontée, candide, cruelle, tourmentée, la petite fille détaille son quotidien, ses jeux et ses rêves dans une succession de chapitres vifs. Et puis la guerre arrive, enserre la villa dans un étau chaque jour plus étroit. La tragédie approche, elle prend son temps puis finit par s’abattre, implacable, sur Penny et les siens. L’enfance est révolue et l’innocence avec elle, mais dans le cœur de Penny et de sa sœur demeurent, irréductibles, des éclats de beauté et de poésie. L’héritage de la Villa et de ses habitants, ce « Souvenez-vous » qui est la dernière parole de l’oncle au seuil de la mort.
Lorsqu’elle publie Le ciel tombe en 1961, Lorenza Mazzetti ne dévoile pas que c’est sa propre enfance que l’on y lit. Elle attendra trente ans pour le révéler. Raconter cette histoire lui permet d’apaiser les fantômes qui la hantent : « tous les survivants portent en eux le poids de ce « privilège » et le besoin de témoigner ». Le ciel tombe est un chef d’œuvre sauvage, d’une rare intensité.
La Baconnière, traduit de l'italien par Lise Chapuis, 19 euros