librairie
point virgule

Rue Lelièvre, 1 B-5000 Namur | Tél. : +32 (0)81 22 79 37 | info@librairiepointvirgule.be | Du lundi au samedi de 9h30 à 18h30

eviter les peages - colinL'avis d'Adrien :

Éviter les péages, c'est la crise de la quarantaine en plein. Le narrateur, taximan, père de trois enfants, ressent une grande monotonie dans son couple. Sa femme et leurs enfants vont le laisser seul le temps d'une semaine, lui permettant, si pas de remettre de l'ordre dans sa vie, du moins de se poser les bonnes questions.

Nous donnant à lire un road movie —taxi oblige— bruxellois, Jérôme Colin livre beaucoup de lui-même avec cet alter ego à peine déguisé. Alternant les rencontres tendres et cocasses (le fantôme de son père, un client régulier, un copain de beuverie...), ce premier roman à la bande-son impeccable et à la sincérité désarmante bien qu'ayant les petits défauts d'un premier roman - formules parfois faciles, petites longueur - est une vraie réussite !

Et que ne durent que les moments doux...


Allary Éditions, 20,40 €btn commande
 

argile et de feu - madelaineL'avis de Régis:

"Je suis un point qui marche". C'est par cette phrase que commence le roman d'Océane Madelaine. Nous, lecteurs, allons suivre à la trace la narratrice de ce roman, qui est une femme en fuite, un point qui tente de toutes ses forces de quitter le cadre, la grille dans lesquels la vie quotidienne l'a enfermée. C'est une marche de la colère, du refus de la norme. C'est aussi un long chemin vers son enfance, marquée par un drame qu'elle a tenté d'oublier pendant toutes ces années.

En parallèle à cette quête des origines, elle va croiser le destin de Marie Prat, une potière du 19e siècle, dont la force de vie va transformer à jamais la jeune femme.

D'une écriture précise, dépouillée à l'extrême, Océane Madelaine met des mots sur l'indicible.

"D'argile et de feu" a reçu le Prix Première des auditeurs de la RTBF.

Edition des Busclats, 12 €btn commande

en face demartyL'avis d'Adrien :

Jean Nochez, tiens, tiens, l’anagramme quasi complète de Jean Echenoz, l’auteur entre autres de Je m’en vais - par ailleurs Pierre Demarty insère dans son texte de très nombreuses références littéraires avec toujours beaucoup d'humour -, Jean Nochez, donc, marié, père de deux enfants, philatéliste de profession mène une vie sans fard, excessivement monotone. Il est tellement moyen, d’une normalité confondante, que le seul excès qu'on puisse trouver dans sa vie est dans cette monotonie.

Une simple pancarte "A louer" apposée sur l'immeuble en face de chez lui va tout bousculer dans sa vie. Une visite de l'appartement en question et sans trop savoir pourquoi, Jean prend la décision, fait déjà relativement marquant dans sa vie, de le louer. Sans rien dire à sa femme, Solange, et à ses enfants, le voilà parti pour une grande aventure. Jean va petit à petit quitter sa vie, faire ce pas de côté et s'installer "en face".
 
Convenons que c'était une extravagance. Que dis-je, une folie. Et à ce titre, une anomalie totale, un parfait hapax dans l'existence de Jean Nochez, laquelle avait jusqu'alors, eût-on dit, mis un point d'honneur à circonvenir toute manifestation d'impulsivité, toute forme d'événement, de quelque nature que ce fût. Jean Nochez, fantassin admirable de la division des ombres qui parmi nous se dirige à pas certains, incalculable et inhéroïque, vers le terme du combat sans songer un seul instant à en dévier l’issue, Jean Nochez, suprême et paradoxale incarnation de ce que l’humanité peut avoir de plus désincarné, Jean Nochez, huître, moule, mollusque, particule, en un mot très exactement individu, n’avait pas la moindre raison de se concevoir capable d’un geste si singulier.
 
L'histoire qui ne peut que mal se terminer est narrée gouailleusement par un des quelques piliers de comptoir que compte "Les indociles heureux", bar du coin de la rue, que va se mettre à régulièrement fréquenter Nochez lors de son extraordinaire épopée.
 
C’est malin, parfois un peu petit malin quand les jeux de langage se font trop ostentatoires, brillantissime par moment, terrifiant, drôle et littéraire la plupart du temps. Pierre Demarty, éditeur et traducteur (Joan Didion, William T. Vollmann, Paul Harding…) nous offre avec ce premier roman un excellent et jouissif moment de lecture.
 
Nous ne résistons pas pour terminer à vous livrer un second extrait gentiment et délicieusement grivois qui dit aussi tout le sel de l'histoire :
 
Tu le savais, toi (mais on entend bien qu'il ne s'adresse à personne en particulier, que c'est à la cantonade qu'il édifie), que Paimpol était jumelé à Grundarfjördur ? Hein ? Pas mal, non ? C'est quoi, Grmlfrdour ? C'est l'Islande, fiston. C'est l'Islande. Un jour, ajoute-t-il dans un susurrement inusité à l'intention de sa femme comme s'il lui faisait miroiter une polissonnerie, un jour nous irons en Islande. Et Solange, dont on gage qu'elle ne s'est jamais aventurée au-delà des positions, étroites d'esprit et du reste, sur lesquelles campe d'ordinaire le missionnaire, et qu'un rien de scandinaverie suffit par conséquent à plonger dans un embarras émoustillé, Solange rougit.
 
Flammarion, 17 €btn commande