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madeleine project - clara beaudouxL'avis d'Anouk:

Madeleine est née en 1915 et décédée en 2012. Entre les deux dates, presqu'un siècle d'une vie bien remplie. Une cave oubliée dans un immeuble parisien en raconte les mille facettes: des cahiers d'écolière et des lettres d'amour, des photos et des cartes postales, des livres et des services à café, des dentelles et un manteau de fourrure, tout le marabout-bout de ficelle d'objets entassés au hasard des années.

Lorsque Clara Beaudoux s'installe en 2013 dans l'appartement que Madeleine a longtemps habité, les héritiers de la vieille dame ont oublié l'existence de la cave et ne l'ont pas vidée. Voici donc la jeune femme dépositaire de la mémoire d'une vie. Elle aurait pu tout jeter, mais piquée par la curiosité elle se plonge dans les cartons et valises soigneusement empilés. Et très vite l'émotion la prend. Elle la partage sur Twitter, à coups de messages de 140 signes, fédérant très vite autour de ce "Madeleine Project" une communauté vibrante.

C'est le recueil de ces tweets que publient aujourd'hui les éditions du Sous-Sol. Et l'on s'étonne de la profondeur du livre. Qui aurait cru qu'en 140 signes on pouvait donner tant d'émotions, de réflexion, de beauté? Que l'on sentirait naître à elle-même, à travers la vie d'une autre et dans une forme qui semble si éphémère et superficielle, une jeune femme d'aujourd'hui?

"Madeleine Project" est un livre sur la mémoire, sur les méandres de la vie, sur ce que les objets disent de nous. En exergue, ces quelques mots de Chris Marker donnent à penser:

"Mon hypothèse de travail était que toute mémoire un peu longue est plus structurée qu'il ne semble. Que des photos prises apparemment par hasard, des cartes postales choisies selon l'humeur du moment, à partir d'une certaine quantité commencent à dessiner un itinéraire, à cartographier le pays imaginaire qui s'étend au-dedans de nous".

Éditions du Sous-Sol, 18 €btn commande

illetreL'avis d'Edith:

« Il y a beaucoup de choses que Léo ne peut pas faire. 1) Lire un courrier. 2) Lire les pancartes à l'usine ce qui lui éviterait de passer sous un rouleau compresseur. 3) Remplir sa feuille d'impôts. 4) Faire ses courses sans acheter toujours la même chose en raison des prix sur les emballages (...) ».

5) Mettre des mots sur ce qu'il y a en lui.

On n'a pas idée de tout ce que c'est d'être illettré. Cécile Ladjali en donne un aperçu à travers Léo, sa prison quotidienne de signes incompréhensibles et son cœur tout mélangé.

Simple et direct, droit au but et au cœur, « Illettré » ne prend pas de détours.

Actes Sud, 19 €.btn commande

en attendant bojanglesL'avis d'Adrien :

En commençant la lecture de ce premier roman, on peut craindre que le baroque des situations soit submergé par d’indigestes bons sentiments, puis il n’en est rien. Le cocktail prend, le dosage est parfait, nous vient l’envie de danser sur le Mr Bojangles de Nina Simone avec le trio familial, acteur de cette histoire. Le charme opère.

Un jeune enfant, dont on ne connaît l’âge précis, nous raconte sa vie, sa famille, son quotidien hors du commun et surtout l’histoire d’amour de ses parents et comment sa maman, fantasque à souhait, a fait basculer son papa dans sa douce folie. Le père a en effet décidé de suivre sa dulcinée dans tous ses délires, dans tous ses caprices – élever en appartement une grue de Numidie nommée Madame Superfétatoire, ne jamais ouvrir le courrier administratif et l’entasser au milieu du logis, nocer chaque nuit dopés au Champagne et aux mélanges d'alcool en tout genre avec des amis hauts en couleur, se dégoter un château en Espagne, entres autres élucubrations. Et que tout cela coule de source, que le quotidien soit une fête, que la liberté soit totale.
De courts et magnifiques extraits du journal intime du père viennent de-ci de-là éclairer d’un autre angle l’histoire. Avec eux, bien que l'enfant dégage une certaine maturité, nous prenons un peu plus de hauteur. Et si au départ tout est charmant, par la suite, ça grince, on se rend compte que la folie douce est en réalité maladive. Si tous les membres et proches de la famille décident d’y succomber, c’est pour mieux la supporter, qu’elle ne soit pas un frein à la vie. C’est là qu’Olivier Bourdeaut réussi un tour de force. On se laisse bercer par une légèreté drôle, sucrée et agréable et pourtant la profondeur est là. Évoquer le Boris Vian de L'écume des jours et la magnifique et tragique histoire d'amour entre Colin et Chloé est assez juste.

Ce premier roman est une grande réussite, drôle, lumineux, plein de fantaisie, à la fois léger, mais plus profond qu’il n’y paraît. Il y a l’amour, il y a la folie, il y a l’amour fou et la vie. Dansons maintenant !

Editions Finitude, 15,50 €btn commande

 

nina