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pavelL'avis d'Adrien :

Savoureuses chroniques d’enfance d’Ota Pavel – nom tchèque adopté par sa famille après la guerre remplaçant le nom juif de Popper – dans la belle Bohème tchécoslovaque, ce livre produit, comme le dit le grand auteur italien Erri de Luca cité en quatrième de couverture, des bulles de joie sous la peau.

Tout n’y est pas rose, les temps s’assombrissent, son père juif et ses deux frères seront déportés au camp de concentration de Terezin en reviendront vivants, et consécutivement, le régime communiste ne rendra pas leur existence plus enviable. Toutefois, la poésie, l’humour, l’originalité de l’écriture de Pavel adoucit ces faits tragiques, nous fait rire et sourire.

On y découvre surtout son papa, grandiloquent représentant – détenteur du record international de ventes d’aspirateurs pour Electrolux, il ira jusqu’à en vendre dans un village non relié à l’électricité –, mari fidèle mais fieffé dragueur et surtout pêcheur passionné. A travers les yeux d’enfant de Pavel, c’est la figure tutélaire du père qu’on voit ici, nébuleux géant, ogre bienfaisant, fragile colosse, entrepreneur à l’ambition bancale (après les aspirateurs, il se lancera dans le commerce de tue-mouches révolutionnaires mais foireux pour passer ensuite à l’élevage de porcs puis de lapins). Le fils et romancier ne lui tient pas rigueur de parfois abandonner sa famille pour suivre ses élans hasardeux, tant il représente pour lui la gaieté, le courage et aussi une sorte de bon sens tordu.

On peine à croire que Pavel écrivit ces tendres vignettes interné et touché par une grave dépression. Prenons-les pour une exhortation à la vie et à ses bons moments, des méditations sur la survie, sur le devoir salutaire de mémoire. C’est extrêmement touchant et teinté d’une mélancolie compensée par une jubilation folle et des descriptions de la nature enchanteresses.

Nous remercions chaleureusement Do, cette jeune maison d’édition bordelaise, de nous faire découvrir pour la première fois en français ce classique de la littérature tchèque. Nous allons nous plonger dans le reste de leur catalogue assurément prometteur.

Traduit du tchèque par Barbora Faure, Do Editions, 20 €. btn commande

 

canneL'avis d'Adrien :
 
Jean Toomer fut avec Canne le fer de lance de l’Harlem Renaissance, mouvement de renouveau de la culture afro américaine de l’entre-deux-guerres. Toomer disait que coulait en lui sept sangs différents mais quand dans sa jeunesse on le qualifiait de métisse, lui se revendiquait américain. C’est en se confrontant à la ségrégation raciale du sud qu’il affirma son identité afro-américaine et vint alors Canne.
 
Publié en 1923 – la présente traduction française est celle de 1971 exclusivement destinée alors à l’Afrique francophone – mélange de chants, poèmes, nouvelles, à la fois onirique et réaliste, cartographiant avec lyrisme le peuple afro de Géorgie ainsi que les quartiers noirs de Washington, Canne (comme le sucre de, et ses plantations du Sud) est assurément un chef d’œuvre de la littérature du 20e siècle et c’est peu de le dire. Tout cela coule d’une belle source, on sent que chaque mot est naturellement pesé et soupesé, le mot juste placé au bon moment au bon endroit de sorte que cela nous entraîne dans un tourbillon de littérature, on peut le relire sans fin en découvrant à chaque lecture un nouvelle trésor caché. Les mots manquent réellement pour dire la beauté de Canne et je mentirais par omission si je ne vous disais pas simplement que c’est absolument magnifique et puissant. Toomer s’immerge complétement dans chacun de ses personnages, dans chacun de ses poèmes. Il nous parle des afro américains, de leur condition, esclavagisme aboli dans la loi, esclavagisme toujours bien présent dans les faits, ce qui malheureusement se vérifie encore en grande partie, notamment aux Etats-Unis.
 
La bonne littérature éclaire le lecteur d’une lumière nouvelle, la grande littérature s’insinue en chacun de nous, transcende son temps, et sa puissance se vérifie bien après sa publication, Canne est de cette trempe.
 
Et si vous n’êtes pas encore convaincu, je terminerai cette bafouille par ce qu’en dit un éminent confrère « Des mots comme chef d’œuvre ne suffisent pas. Je donne 90 % de ce que j’ai lu dans ma vie pour ce seul livre. Et je suis sérieux. »
 
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Jean Wagner, Ypsilon, 20 €
 

en route vers toi L'avis d'Edith:

Ce livre, on le boit. Les mots coulent, l'histoire avec et on bondit à chaque chapitre du début du 20e siècle au début du 21e. Dans les années 1900, nous sommes avec Signe. Une jeune femme pleine de force, institutrice primaire dans un village de la campagne suédoise, qui se lance dans la lutte pour les droits civiques des femmes. Signe milite pour le droit de vote, écrit... et tombe amoureuse d'une autre femme. Un siècle plus tard, nous sommes Hanna, jeune femme désenchantée et un peu perdue. Puis un jour, Hanna se retrouve successivement en possession de quatre objets qui ont appartenu à Signe. Les bottines d'un siècle au pied et d'une démarche toute neuve, Hanna mène sa drôle d'enquête.

« En route vers toi » nous transporte dans l'univers des suffragettes suédoises du 20e siècle, en faisant résonner avec force leur écho dans le présent. Une puissante histoire de femmes, de féministes, d'amour, d'idéaux et de courage quotidien. Et une petite touche de magie, cachée dans une paire de bottines, une paire de lunettes, une règle et une broche...

Magnifique roman !

Actes Sud, 23.80€btn commande