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Les communs, la mise en commun des ressources, l’économie participative et collaborative a de plus en plus le vent en poupe. Si ce n’est dans la réalité, du moins dans les publications récentes, voir le succès de Gaël Giraud avec "Composer un monde en commun", et rien que ces dernières semaines les titres "Retour aux communs", "Le pouvoir subversif des communs", "La condition terrestre: habiter la Terre en communs"...
Sort donc en cette fin d’année un projet au long cours et tout personnel d’Emmanuel Lepage, la magnifique bd, tant dans le fond que dans la forme, "Cache-cache bâton", du nom du jeu en extérieur inventé par les enfants d’une petite communauté d’habitats groupés dont faisait partie Emmanuel Lepage.
Durant quelques années de son enfance au début des années 1970, l’auteur a donc vécu dans une petite communauté d’habitats groupés. L’intention était belle, la réflexion s’est faite peu avant mai 68 et vient de catholiques de gauche en rupture avec l’institution cléricale. Emmanuel Lepage fait témoigner tous les protagonistes et va montrer comment petit à petit, cette utopie va se transformer, faire naître des rancœurs et comment les petites querelles vont faire capoter un projet qui reste néanmoins beau et une piste à creuser pour un avenir plus solidaire. Captivant et inspirant !
Arsène et Bartoli, deux frères oursons adorent s’amuser à titiller les êtres plus petits qu’eux, vers de terre, fleurs, tout y passe. Ils restent gentils mais tout de même…
Quand, dans leurs pérégrinations, les oursons tombent sur une toute petite maison, c'est le début d'une grande aventure à la découverte d’un monde en miniature.
Ils se promettent d’y revenir et dès le lendemain, y découvrent un gâteau. Arsène, gourmand et curieux, englouti la pâtisserie et devient tout petit. La nuit, dans son lit, il ne pense qu’à goûter à nouveau à la délicieuse sucrerie. N’écoutant que son courage, il se lance dans une virée nocturne en solo mais le chemin est plus long et les obstacles plus grands pour ce mini Arsène. Un nouveau gâteau récompense son arrivée à la bicoque mais après ingurgitation le voilà aussi petit qu’une coque. Un lutin, gardien de la maisonnée et des petits êtres de la forêt, va lui faire comprendre que tous les êtres, grands et petits, ont leur place dans le monde.
Un album jeunesse tout en douceur aux traits magiques qui donne une bonne leçon aux puissants avec humour et fantaisie.
L'école des loisirs, 14.50 €
La collection Les Affranchis fait cette demande à un auteur ou une autrice: écrivez la lettre que vous n’avez jamais écrite.
Pour Geneviève Brisac, c’est une évidence. C’est à Virginia Woolf, "amie des sombres temps", qu’elle adressera non pas une mais onze lettres. J’ai posé sur ma table de travail les indices qui me poussent à me lancer dans cette aventure : vous écrire pour vous donner de nos nouvelles, de mes nouvelles, et prendre des vôtres.
Geneviève Brisac est une immense romancière et une grande spécialiste de l’œuvre de Virginia Woolf. Elle lui a d’ailleurs consacré un essai, écrit à quatre mains avec Agnès Desarthe, V.W (éditions de l’Olivier). L’ouvrage qu’elle publie ici, correspondance imaginaire, fait partie de ces livres que l’on voudrait mettre dans toutes les mains amies, des pages précieuses sur la littérature, le temps, la création.
Onze lettres pudiques à une écrivaine d’un autre temps mais dont l’œuvre et la pensée ne cessent d’éclairer notre époque. Onze lettres qui disent, sans détour, qu’une autrice a sauvé la vie d’une jeune femme, et sans doute de bien d’autres. Car les livres de Woolf ont ce pouvoir de la consolation. Car Woolf, brillante intellectuelle, était aussi et avant tout une femme douée pour l’amitié.
Ôtez-moi l’amour que j’ai pour les amis, l’urgence dévorante qui m’attire vers la vie humaine, ce qu’elle a d’attirant et de mystérieux, et je ne serais plus qu’une fibre incolore que l’on pourrait jeter comme n’importe quelle déjection.
Jaillit aussi en ces pages une réflexion stimulante sur cet art presque perdu de la correspondance. On y ressent, au détour de chaque phrase, l’intense affection de Geneviève Brisac pour ce temps si particulier de l’écriture de lettres et pour cette joie indescriptible d’une réponse qui arrive. Et c’est merveilleux.
disponible en format numérique ici.
Patrick Boucheron est un homme-histoire, l’incarnation d’un savoir partageur. Sa rigueur et son érudition, impressionnantes, s’accompagnent d’une passion communicative. L’histoire telle qu’il la conçoit réactive les imaginaires des siècles passés et fait résonner dans notre aujourd’hui les mémoires et les émotions d’hier.
Avec ce nouveau livre, Patrick Boucheron se penche sur une trentaine de « dates » emblématiques, ces événements avec lesquels on a longtemps structuré le temps long. En les mettant en relation de façon toujours étonnante et stimulante, Patrick Boucheron invite à penser l’histoire autrement. De la grotte de Lascaux au coup d’état de Pinochet, du procès de Socrate aux massacres d’Algériens à Paris en octobre 1961, en sautant par-delà les siècles et les continents, Patrick Boucheron « défrise » l’histoire conventionnelle, et c’est passionnant.
« Je ne sais pas ce que c’est qu’une date importante. Ce que je sais, c’est ce que la mémoire peut en faire ».
Disponible en format numérique ici
Ho, quelle bonne idée qu’ont eue les éditions Denoël de rééditer ce roman rédigé en 1969 par Gordon Williams, dans leur collection « Sueurs froides » ! Car oui, ce texte est destiné aux amateurs de frissons, et je ne parle pas de ceux procurés par la brise de décembre. Quoique…
Un couple anglo-américain d’universitaires, se targuant d’être des intellectuels de gauche et dont les relations battent furieusement de l’aile, quittent le Nouveau Monde pour s’installer dans une bourgade anglaise des plus reculées. C’est que la vie champêtre de l’Angleterre permettra certainement à monsieur d’insuffler à la rédaction de son ouvrage consacré à un écrivain anglais méconnu, toute l’authenticité que ce dernier mérite. Ici, vivent en vase clos depuis des générations, une poignée de gars et leur famille, dont l’isolement et la marginalité ont nourri les frustrations et fermé les esprits déjà peu enclins à la tolérance de l’étranger. Puis, un soir de décembre, une tempête de neige barre tous les accès au village, enfermant nos nouveaux arrivants dans un huis-clos épouvantablement glaçant !
La plume subtilement aiguisée de l’Écossais Gordon Williams mêle à la fois ironie distante et drôle dans le portrait des personnages, et réflexion sur la marginalité sociale et l’incontrôlable folie qui peut s’emparer d’un groupe d’individus. Un récit qui, débutant dans le registre de la comédie familiale, va crescendo et laisse le lecteur pétrifié. Un conseil, toutefois, avant la lecture : vérifiez que les verrous de votre maison soient bien fermés.
Denoël, traduit de l'anglais (Écosse) par Frédéric Brument, 21 €