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lapromo49L'avis d'Adrien :
 
Il est des joyaux qu’il est surprenant de seulement découvrir. L’an dernier, la formidable et jeune maison d’éditions Cambourakis éditait pour la première fois en français le non moins formidable Sale temps pour les braves de Don Carpenter – qui vient de sortir en poche chez 10/18. Ce roman, publié aux Etats-Unis en 1966, fût réédité en 2010 car même dans son pays, Carpenter n’eut de son vivant le succès qu’il mérite. Bijou de noirceur, nous étions avec les laissés-pour-compte dans les Etats-Unis des années 50 qui passent d’orphelinats en maisons de redressement en passant par la case prison… Et si on peut croire et espérer que le salut arrive pour l’un d’eux, il n’en est rien, sale temps pour les braves.
 
Le travail d’édition française de Don Carpenter se poursuit donc avec La Promo 49. Plus court, moins sombre mais pas moins bouleversant et profond que Sale Temps…, nous suivons ici en 24 nouvelles la promo 49 d’une école de Portland. Les portraits s’entrecroisent et ce sont des moments d’une universalité pénétrante qui nous font face. Composé d’angoisses existentielles d’une reine de bal, de rumeurs avilissantes de couloirs d’écoles, de discussions sur un éventuel futur job, mariage, université ou engagement dans la Marine, de besoins d’amour et de sexe, le livre dépeint avec beaucoup de finesse, de mélancolie, de simplicité apparente mais aussi d’humour, le passage de l’adolescence à l’âge adulte. A la manière d’un Raymond Carver, Carpenter nous dresse dans ses romans et ses nouvelles des instantanés de la jeunesse avec un tel brio que ses lecteurs sont loin, cette fois, d’oublier son nom !
 
Traduit de l'américain par Céline Leroy
 
Cambourakis, 17,50 €

L'avis d'Anouk :

Malgré la chanson de Mike Jagger, le temps n'est pas toujours de notre côté.

une fille qui danse 2Dans le Londres des années 60, un lycéen brillant et sarcastique répond à un professeur qui lui demande ce qu'est la grande histoire : "le discours des vainqueurs". Le trait se veut irrévocable, mais le vieux professeur de répondre, philosophe : "... ou celui que les vaincus se racontent à eux-mêmes..."

Il faudra quarante ans au lycéen d'alors pour comprendre la profondeur de cette remarque et se rendre compte, amèrement, qu'elle est l'explication de ce qu'a été sa vie.

Tony Webster semble pourtant s'en être plutôt bien sorti : la vie a coulé sur lui sans trop le malmener. Mais elle a encore quelques surprises à réserver au sexagénaire.

Un étrange testament le force en effet à replonger dans le passé et à explorer l'époque de ses vingt ans. Ses amis d'alors, la fille qu'il aimait, ses voyages, ses rêves de jeune homme : qu'en reste-t-il au juste? Et les souvenirs qu'il a conservés de ce temps-là ne sont-ils pas de complaisants mensonges?

Avec Une fille, qui danse, Julian Barnes écrit le roman de la mémoire et des remords. C'est implacable et magnifique.

Traduit de l'anglais par Jean-Pierre Aoustin, Mercire de France, 19 €btn commande

L'avis d'Anouk :

le dtour 2Il y a quelques années, lors de la traduction de "Là-haut tout est calme", l'écrivain néerlandais Gerbrand Bakker a été unanimement salué comme l'une des nouvelles grandes voix de la littérature européenne. Le jugement se confirme aujourd'hui, avec la parution d'un nouveau roman âpre et puissant. "Le détour". tragique portrait de femme, est un roman tout à la fois noir et absolument lumineux. On y suit le destin d'une universitaire néerlandaise qui se fait appeler Emily, comme la poétesse à laquelle elle consacre ses recherches, Emily Dickinson. Elle vient de quitter sa vie d'avant (son métier, son mari, ses parents) pour s'installer dans la solitude d'un village du pays de Galles. Son quotidien prosaïque, fait de jardinage, de longues marches, d'un entêtant silence, semble offrir à cette femme en crise les conditions d'une possible renaissance. Il n'en sera rien.

Dans une langue toute en retenue, Gerbrand Bakker offre un roman d'une force rare. "Le détour" parle sublimement de la sauvagerie de la nature, des prédateurs qui rôdent et semblent matérialiser les démons intérieurs d'Emily, des échos du silence. Le roman offre surtout des portraits inoubliables, celui d'Emily bien sûr, mais aussi de complexes et indéchiffrables personnages masculins. Maîtrisé, économe, dérangeant, "Le détour" est une éblouissante leçon de littérature.btn commande

Traduit du néerlandais par Bertrand Abraham

Gallimard, 19,90 €