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blanes - hedwige jeanmartL'avis d'Anouk:

Blanès est une station balnéaire comme il y en a tant sur la côte espagnole, pas bien loin de Barcelone. La ville pourtant n'est pas tout à fait comme les autres: elle a longtemps été celle de l'écrivain chilien Roberto Bolaño et attire depuis la mort de ce dernier des pèlerins de tous horizons. Les bolañistes forment une secte loufoque et vaguement inquiétante, où l'ambition suprême consiste à devenir gardien de camping (un job exercé quelques temps par le grand homme).

C'est dans cette atmosphère étrange que débarque Eva. Elle vient de Barcelone après avoir mystérieusement perdu Samuel, l'amour de sa vie, écrivain reconnu et grand lecteur de Bolaño. Or Samuel a précisément disparu un dimanche soir alors que le couple rentrait d'une visite à Blanès...

Dévastée, tout à la fois rageuse et désespérée, incomprise par tous ses proches, Eva veut comprendre ce qui s'est passé. Dans sa quête de femme blessée, elle croisera des personnages hauts en couleur qui lui permettront, peut-être, de retrouver du sens malgré l'absurdité du monde. On se met d'emblée dans les pas d'Eva. Sa détermination, sa fantaisie, son ouverture aux autres en font un personnage singulièrement attachant.

Avec Blanès, Hedwige Jeanmart signe un premier roman émouvant et enjoué, loin des chemins balisés. C'est aussi un bel hommage aux pouvoirs de la littérature, mais un hommage rendu sans forfanterie, avec une vraie générosité : oui, les livres peuvent faire dévier le cours d'une vie, et oui, ils sont une façon de résister au conformisme, à tout ce que notre époque attend de nous.

Gallimard, 18,50 €

PRIX ROSSEL 2014btn commande

la scierieL'avis d'Adrien :

J’écris parce que je crois que j’ai quelque chose à dire. C’est ainsi que commence ce récit anonyme et espérons que le message passe auprès de directeurs éditoriaux trop avides d’encombrer les tables des librairies !

Un jeune homme issu de la bourgeoisie française ayant raté le bac en seconde session et attendant le  papier de son engagement dans la Marine, désire, pour subvenir à ses besoins et muscler son corps d’adolescent chétif, se faire employer dans un métier manuel. Ce sera les scieries. Deux ans durant, à toute saison, il sera debout à six heures du matin, fera les kilomètres qui le séparent de son lieu de travail à vélo et ne reviendra que le soir déjà bien tombé. Entre son lever et son coucher, un travail à la chaîne cassant, harassant, abrutissant et plus que risqué l’occupera. D’une écriture brute et limpide, il ne s’agit pas ici de rendre compte d’une quelconque expérience anthropologique d’un jeune homme de bonne famille s’immergeant dans le rude quotidien des petites gens, mais bien de rendre compte de ce qu’est le travail et comment il forme et déforme. Travailler toujours plus fort, toujours plus vite, toujours plus lourd, toujours plus près de la lame d’une scie circulaire au bruit assourdissant et hypnotisant jusqu’à l’accident. Un récit fort et qui résonne bien longtemps après avoir tourné la dernière page.

La scierie vient de recevoir le Prix Mémorable des librairies Initiales. Le Prix Mémorable a été créé pour saluer la réédition d’un auteur malheureusement oublié, d’un auteur étranger décédé encore jamais traduit en français, ou d’une traduction nouvelle d’un auteur. C'est notre façon d'affirmer que la librairie indépendante, c’est avant tout un fonds.

Héros-Limite, 16 €btn commande

Dans la nuit et le vent - FermorL'avis d'Anouk

Il y a un peu plus de 80 ans, un jeune Anglais de 18 ans quitte Londres et sa vie d'étudiant pour traverser l'Europe à pied, "comme un clochard — ou, selon une de mes formules typiques, comme un pèlerin ou un moine itinérant, un goliard, un chevalier désespéré". Son objectif: Constantinople, en suivant le Rhin puis le Danube. Les éditions  bruxelloises Nevicata publient aujourd'hui le récit intégral de cette épopée hors du commun, et c'est un événement: Patrick Leigh Fermor est aussi révéré chez les Anglais que Nicolas Bouvier ou les plus grands écrivains voyageurs.

Avec la fraîcheur de son jeune âge et l'ironie dandy d'un garçon de (très) bonne famille, Fermor raconte une Europe sur le point de basculer dans l'horreur. Il traverse l'Allemagne qui vient de confier son destin aux mains des nazis, boit du tokay dans les chateaux de l'aristocratie hongroise, dort sous la tente avec les Roms, découvre le rebetiko lancinant des Grecs, lit "Don Juan" dans un monastère du Mont Athos... Le mélange des genres, les langues, des milieux sociaux fait tout l'intérêt de ce texte savoureux, pétri d'intelligence, de bienveillance et de culture.

Neuf cent pages qui invitent autant au voyage qu'à la fête de l'esprit: une parfaite lecture pour l'été!

Traduit de l'anglais par Guillaume Villeneuve, Nevicata, 29 €

chapiteau vert - oulitskaiaL'avis d'Anouk

Tout commence avec un pauvre chaton: c'est cet animal fragile, qui fait office de ballon pour les enfants de leur classe, qui va unir les destins d'Ilya, Sania et Micha. Les trois écoliers sont comme leur petit protégé —  des mal-aimés, victimes des moqueries et de la violence des gamins de leur âge. Et si le chaton meurt immédiatement, l'amitié qui s'est scellée entre les trois garçons pour le sauver de ses bourreaux durera aussi longtemps qu'ils vivront. En quelques pages (le chaton meurt à la page 19), Ludmila Oulitskaïa réussit à accrocher ses lecteurs, à les prendre par la main pour un long, passionnant et éprouvant voyage.

De la mort de Staline à la Russie post-soviétique, c'est quarante ans d'histoire russe que revisite "Le chapiteau vert", et le roman se place délibérément du côté de la dissidence, de ces voix fragiles, maladroites, obstinées qui ont courageusement bravé la peur et la violence d'un régime alors tout-puissant. Ilya, Sania et Micha seront chacun à leur manière des âmes rebelles, puisant dans leur amitié et dans le souvenir d'un professeur de lettres anticonformiste l'énergie de vivre conformément à leurs idéaux. Il y aura sur leur chemin des moments de répit, des amours fulgurantes, des solidarités indéfectibles. Il y aura surtout l'ombre partout présente de la peur, les perquisitions et les entretiens musclés avec le KGB, les années de camp et de rélégation, les compromissions, l'exil.

En dressant le portrait de trois personnages inoubliables, Ludmila Oulitskaïa rend un hommage vibrant à toutes les grandes figures, bien réelles celles-là, de la dissidence. Tous ces gens qui ont permis la fin d'un des régimes totalitaires les plus sinistres du XXe siècle. Dans une fresque au souffle romanesque impressionnant, elle donne une formidable leçon de vie, de courage et d'engagement, qu'elle dédie à "ceux qui ont été irréprochables et ceux qui ont trébuché en ces temps meurtriers, ceux qui ont tenu bon et ceux qui n'y sont pas parvenus".

Ludmila Oulitskaïa fait dire à l'un de ses personnages, lors de la publication clandestine du "Docteur Jivago" de Pasternak: "un magnifique post-scriptum à la littérature russe classique!". On lui adresse volontiers pareil compliment. Il y a chez elle la fougue, la virtuosité et le sens du tragique des plus grands.

On sort ébloui d'une telle lecture, et infiniment reconnaissant pour tant d'humanité.

Traduit du russe par Sophie Benech, Gallimard, 24.90 €btn commande

Ca y est, c'est les vacances ! De longues semaines pour rêver, jouer, découvrir des tas de nouvelles choses ! A la librairie, nous avons sélectionné pour les petits et les plus grands des tas d'albums, de romans, de livres d'activités qui transformeront votre été par leur humour, leur imagination, leur originalité. Pour les plus petits, quelle joie de retrouver Lou et Mouf, les célèbres personnages de Jeanne Ashbé dans une nouvelle aventure : Bonnes vacances, Lou ! (éditions Pastel). Plein de poésie, de légèreté et un cahier rempli de jeux malicieux, le tout dans un joli petit sac à emmener partout, sur les routes embouteillées et les chemins de promenade.