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Hasard du calendrier ou marketing taquin au bras long… Le jour où on apprend qu’un pont hollandais bientôt centenaire et rénové en 2017 devrait être démonté pour laisser passer le luxueux yacht de Jeff Bezos, mirifique patron d’Amazon, il est à la fois réjouissant et effrayant de voir que Pierre Maurel, avec Michel, son héros des temps modernes (tome 1), ce fils des âges farouches (tome 2), s’est emparé du sujet, dénonçant cette absurdité de notre temps.
Michel, après avoir réalisé des reportages radio en freelance sur des cheminots en grève, sur les gilets jaunes, sur tout qui était mis sur le bas-côté par la start-up nation de la génération Macron, s’est retiré à la campagne. Il pensait trouver là simplicité et apaisement ; c’était sans compter sur le passage incessant de semi-remorques transportant d’énormes yachts sur de petites routes en lacets afin d’atteindre le mouillage à la belle saison. Dans l’attente de la fin du chantier d’un pont ouvrant une voie plus confortable à ces convois exceptionnels, la population du village doit composer avec accidents, bouchons, dégradations de chaussée et autres incivilités. Elle s’insurge mais rien n’y fait. Le maire de la petite commune touchée ne réagit pas. Quel intérêt protège-t-il ? Michel, à qui on ne l’a fait pas, sort de sa retraite champêtre, investigue à nouveau et passe à l’action quand il le faut !
Si vous aimez « Les vieux fourneaux » de Lupano et Cauuet, vous adorerez Michel qui en est un digne disciple. D’album en album, Pierre Maurel croque avec toujours plus de justesse et de finesse notre époque et saisit toutes les petites redditions que « ceux qui ne sont rien » accordent trop souvent aux puissants. Michel ne s’en laisse jamais conter et s’il agit avec énormément d’humour et de bonhommie, il le fait aussi avec pugnacité. Si comme Michel, vous voulez d’une société plus juste et solidaire où l’entraide n’est pas un vain mot, il est temps de mouiller le maillot.
Véritable manuel de désobéissance civile, cette série est parfaite, plongez-vous dedans !
L'employé du moi, 18 €
Gros gros coup de pour cette bande dessinée génialissime que j'ai lue de façon ultra trépidante une nuit à minuit, 3h et 6h du matin. Ca va bien au-delà de cette considération mais lire les aventures de cette beautiful loseuse qui n’obéit qu’à ses envies quand tes bambins se rappellent à toi pendant la nuit, c'est ultra rafraîchissant.
Une anti-héroïne à la Fleabag, jeune trentenaire citadine un peu paumée, qui, non contente de flinguer sa vie sentimentale (ah ça y va !), professionnelle (un job à l’arrache d’embaumeuse aussi bizarre qu’étrange, d’où le sobriquet FUNerariumGIRL), flingue aussi celle de ses amis (une ex et le compagnon de celle-ci).
L’alcool coule à flot, les bêtises qui s’ensuivent aussi. Partout où elle passe, elle sème chaos, exaspération et zizanie
Les couleurs sont vives et pop, les postures dégingandées, le ton enlevé. Aussitôt passée une superbe couverture hommage à Snoopy, héros philo du quotidien des Peanuts, on se retrouve entre Gaston Lagaffe et du trash punk. Faites une belle et grande place à FUNGIRL ! Magistral !
Les Requins Marteaux, 30 €
L'avis d'Adrien :
La série des Paul démarrée il y a un peu plus de vingt ans est très vite devenue un classique de la bande dessinée québécoise, une œuvre patrimoniale. Ce dixième volet est probablement le plus sombre, le plus touchant aussi mais l’auteur nous y réserve tout de même quelques respirations désopilantes qui font aussi tout le sel de cette série.
Les « Paul » forment une fresque à grande part autobiographique mettant en scène l’alter ego de Michel Rabagliati en la personne de Paul Rifiorati. Dans ce volume, Paul se trouve à la croisée de nombreux chemins. Il sort d’un divorce et se morfond dans sa solitude, voit sa jeune fille partir pour l’Angleterre, accompagne sa mère en fin de vie et se sent inexorablement vieillir physiquement et mentalement. Le monde change autour de Paul qui observe toutes ces mutations comme un témoin passif.
Vous l’aurez compris une middle life crisis en plein mais on prend de bonnes bouffées de rire avec un voisin maniaque, une animation scolaire quelque peu foireuse, une foire du livre perfide et autres petits tourments du quotidien vus par le prisme de l’humour. Ajoutez à ça, en arrière-plan, toujours, le Québec et Montréal, les typicités architecturales et sociétales des différents quartiers parcourus par Paul, les expressions fleuries du cru, sans en faire trop, et vous aurez tout le charme hautement prenant de ces chroniques !
A la fois portrait intime et portrait de société, les Paul nous touchent et nous réconfortent par leur universalité.
La Pastèque, 25 €.