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Jens Christian Grøndahl suit un chemin qui n'appartient qu'à lui et l'a mené, depuis Été indien paru en 1994 jusqu'aux Portes de fer, aux sommets de la littérature européenne d'aujourd'hui. Peintre subtil de l'intimité et des mouvements de l'âme, il a aussi l'ambition de prendre à bras le corps le monde et la société dans lesquels évoluent ses personnages: le Danemark occupé de Virginia, les mouvements d'extrême-gauche des années 70 dans Les mains rouges, ou plus près de nous la question éminemment contemporaine de l'Islam européen, dans Les complémentaires.
Les portes de fer est assurément l'œuvre d'un romancier au sommet de sa maîtrise romanesque. Embrassant cinquante années de la vie d'un homme et d'un pays, c'est une fresque de grande ampleur, qui cartographie avec autant de précision les soubresauts de l'histoire que les battements d'un cœur. Grøndahl, dont les romans sont souvent de poignants portraits de femmes, prend cette fois un narrateur masculin. C'est un homme sensible, habité de grands rêves et de doutes abyssaux, marqué par son époque mais la traversant comme en biais. Ses amours ne pourront rien contre la solitude qui l'habite. Son métier d'enseignant lui apprend la bienveillance, mais il ne l'applique pas à sa propre existence.
Les portes de fer peignent ce que c'est qu'être un homme occidental aujourd'hui, et quelles consolations peuvent empêcher une vie de basculer - la littérature, un rire partagé, des luttes et des espoirs. Jens Christian Grøndahl écrit l'intime avec une finesse et une retenue qui bouleversent. Sa langue précise et musicale démultiplie les effets de la mélancolie désabusée du narrateur. Et le lecteur, lui, reste ébloui de tant de justesse.
On dit du Danemark que ses citoyens sont les gens les plus heureux au monde. Le pays peut en tout cas s'enorgueillir d'un écrivain qui nous rend tous, obstinément, un peu Danois.
Jens Christian Grøndahl sera au Théâtre Royal de Namur les 3 et 4 septembre, dans le cadre du formidable intime festival. Ne manquez pour rien au monde la lecture des Portes de fer par Lucas Belvaux et la rencontre avec l'auteur animée par Geneviève Simon: nous sommes certains qu'il s'agira de moments d'exception!
Traduit du danois par Alain Gnaedig, Gallimard, 23.50 €
Disponible en format numérique
Il est des joyaux qu'il est surprenant de seulement découvrir. Don Carpenter est l'un d'eux et le magnifique travail de traduction française par Céline Leroy aux éditions Cambourakis se poursuit avec cet excellent roman.
Un style direct qui touche droit au but et sonne juste, comme si l'auteur se trouvait dans le cœur de chacun de ses lecteurs et ressentait au plus près ses émotions, comme peu savent le faire en réalité.
À la manière d'un Carver, Don Carpenter nous brosse dans ses romans des instantanés de vie avec un tel brio que nous sommes loin d'oublier son nom après l'avoir lu.
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Céline Leroy, Cambourakis, 24€
Jonathan Franzen a décidément bien du mal à se défaire de l'étiquette de "grand romancier américain" qu'il porte depuis quinze ans: à l'instar des Corrections, chacun de ses livres — romans ou essais, tel le bouleversant Zone d'inconfort — laisse exploser un talent hors norme, un sens inouï des personnages, la puissance d'une mécanique narrative mise au service de détails infimes, subtils, infiniment sensibles.
Purity déploie sur quatre décennies et trois continents une impressionnante galerie de personnages tourmentés, comme en délicatesse avec l'existence. Entre tous ceux-ci les fils se tissent, se tendent, se brisent, dessinant des relations complexes et équivoques. L'art de créer et de lancer dans le monde des personnages fascinants est assurément la face la plus bluffante de la virtuosité de Jonathan Franzen. Il y ajoute dans Purity une dimension politique plus mordante encore que dans ses précédents romans, tendant à notre époque un miroir peu flatteur. Car Purity est un livre sur l'injonction de pureté et de transparence, maîtres mots de notre temps, qui cachent sous un idéalisme de façade bien des dévoiements: fascination narcissique, manipulation, troubles identitaires...
Implacable, le roman emmène son lecteur à vive allure vers un dénouement contrasté. Pourtant, malgré la noirceur glaçante du constat, Purity est aussi un livre profondément drôle, avec des scènes d'une cocasserie incroyable, et profondément émouvant: le frisson ressenti en côtoyant Purity, Leila et les autres ne vous quittera pas de sitôt.
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Olivier Deparis, L'Olivier, 24.50 €
Également disponible en format numérique