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cout de la vie levyce que je ne veux levyL'avis d'Anouk:

Un livre bleu.

Un livre jaune.

Deux éclats de couleurs vives dont je sais qu'ils deviendront des points de repère et des points d'ancrage dans ma bibliothèque.

Deux livres modestes et puissants, drôles et déchirants, libres, inclassabes, qui seraient comme le reset pour notre siècle d'"Une chambre à soi" de Virginia Woolf — pas moins.

"Ce que je ne veux pas savoir" et "Le coût de la vie" sont deux pièces du puzzle de la living autobiography de Deborah Levy, le premier arrimé aux années d'enfance et d'adolescence, le second à ce moment, crucial dans une vie, où il faut faire le bilan et s'acquitter du prix de la liberté, du désir, de la clairvoyance.

Les deux livres s'ouvrent sur un ailleurs, le Mexique ou Majorque, dans des auberges où la conversation d'inconnus permet à l'écrivaine solitaire de cerner les points de bascule de sa propre vie: son enfance, l'écriture, son divorce. Le détour aiguise le regard et fait advenir le récit.

"Déployer des idées à travers toutes les dimensions du temps est la grande aventure d'une vie passée à écrire". L'écriture de Deborah Levy a une souplesse incomparable, mêlant dans un même souffle le passé et le présent, le trivial et l'éblouisant, le désespoir et l'ironie. Tout tient ensemble, comme peuvent cohabiter dans son sac de mère divorcée un livre de Freud, un chargeur pour la batterie de son vélo électrique, un rouge à lèvres, un tournevis et cinq clémentines. L'écriture déstabilise les frontières, elle est poreuse au chaos, aux effondrements, aux instants de grâce. Elle attrape la vie dans toute sa complexité et s'en nourrit pour donner du sens, de la consistance, de la beauté peut-être.

On s'arrête souvent à la lecture de ces livres si profondément intelligents, pour relire un paragraphe, retourner en arrière, glaner une phrase éclairante. Comme "Une chambre à soi" a ouvert un espace de réflexion sur ce qu'est une femme qui écrit, les livres de Deborah Levy sont aussi un lieu d'écho et de résonance pour les questions féministes d'aujourd'hui. Ils accompagnent au plus près tous les seuils qu'il faut franchir dans une vie pour gagner la liberté. C'est vivifiant et inspirant.

 


"En fait, j'ignorais totalement à quoi ressemblait la sérénité. La sérénité était censée être l'un des personnages principaux de la féminité telle que la culture la définissait autrefois; Elle est sereine et endurante. Oui, elle est si douée en matière d'endurance et de souffrance que ces caractéristiques pourraient même être les personnages principaux de son histoire.

Peut-être que la féminité, ainsi qu'on me l'avait appris, était arrivée à son terme. La féminité, en tant que personnalité culturelle, n'exprimait plus rien pour moi. Il était évident que la féminit, telle qu'elle était écrite par les hommes et jouées par les femmes, était le fantôme épuisé qui continuait de hanter le début du XXIe siècle. Qu'en coûterait-il de sortir de son rôle et de mettre un terme à ce récit?"

 

Éditions du Sous-Sol, brillamment traduit de l'anglais par Céline Leroy, 16.50 euros par volumebtn commande

Disponible en format numérique ici.