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des maux a dire couv web 400x q80L'avis d'Adrien :
 
Récit intimiste de la démence paranoïde de la mère de Beatriz Lema Rivera, maladie qui a explosé sa famille, un père de plus en plus effacé, un frère fuyant l’ambiance délétère, une fille, l’autrice donc, plus que sollicitée pour s’occuper tant et plus de sa mère.des maux

Au-delà de la sphère familiale, c’est toute la société espagnole post-franquiste qui est décrite par de menus détails, société patriarcale et très religieuse, d’ailleurs le titre original de la bd est Le Corps du Christ, d’où la couverture.

Formellement, c’est grandiose, on passe de dessins au feutre qui tendent au naïf à des scènes brodées magiques, à des rapports médicaux reproduits tels quels, c’est à la fois doux et heurtant. Bea Lema développe notre empathie.
 
Une des plus belles lectures bd de l’année, un Fauve d'or à Angoulême !?btn commande
 
Sarbacane, traduit de l’espagnol par Jean–Marc Frémont, 25 €

dum dumL'avis d'Adrien :

Après « Ville Nouvelle » et « Soleil mécanique », « Dum Dum », du nom de ces munitions qui fracassent par expansion, est la troisième formidable bande dessinée de Łukasz Wojciechowski que les non moins formidables éditions Çà et là font paraître.dum dum image

Łukasz Wojciechowski, professeur d’architecture polonais, est un as sur AutoCAD, fameux logiciel de dessin technique mais il est aussi très fort pour aborder avec finesse les tourments humains, ici, en l’occurrence, l'état de stress post-traumatique d'un ancien soldat de la Première Guerre Mondiale.


Partant de photos d’aïeuls vétérans de la Grande Guerre, l’auteur s’attache à nous tracer le destin de Stan, malheureux troufion, peu à l’aise dans ses relations sociales et virtuose du dessin industriel, que son cousin fait engager au sein de son entreprise spécialisée dans ce type de dessin.

Le modernisme berlinois des années 1930 y est mis en scène de magnifique manière, la prouesse graphique est éclatante, dans la forme mais aussi dans le fond… Car si ledum dum bis tracé est chirurgical, se dégagent, par l’histoire, par la finesse psychologique atteinte au moyen de passages plus abstraits, une humanité, une émotion, une rage rarement ressentie. La frénésie de la ville, le bouillonnement technologique de l’époque, le cinéma expressionniste allemand, l’avènement du régime nazi à venir et les illustrations elles-mêmes sont mis en regard avec le chancre mental dans lequel se trouve Stan, détruit par les horreurs vécues.

Cet ouvrage fort et bouleversant est sublimé par le bel écrin confectionné avec amour par les éditions Çà et là. Magistral !

Editions Çà et là, traduit de l’anglais par Fanny Soubiran, 25 €.   btn commande

blood of the virginL'avis d'Adrien :

Bande dessinée monstre qui nous embarque à folle allure dans les tourments de ses protagonistes et ce, dès la couverture accrocheuse s’il en est.

Editeur de la revue de bande dessinée de pointe Kramers Ergot à laquelle ont contribué la fine fleur de la bd mondiale, Daniel Clowes, Chris Ware, Blexbolex, Ruppert et Mulot entre autres, Sammy Harkham voit publier en français ce second album, dix ans après la réédition de ses histoires courtes « Culbutes » aux mêmes éditions Cornélius. Et déjà dans ce premier album, des récits de bonheurs gâchés…blood 2

Car dans Blood of the Virgin, le héros, Seymour, scénariste et réalisateur de films de série b aimerait porter à l’écran son grand projet personnel et va de déconvenue en déconvenue, de rendez-vous foireux en rendez-vous foireux avec un producteur, de maousses fêtes décadentes et ratées à des esquives non déguisées pour éluder ses demandes. Personne n’écoute réellement ses propositions et le peu d’entre elles qui sont entendues sont rejetées mais il continue d’y croire. Cette plongée dans le monde hollywoodien du début des années 1970 est déjà fascinante en soi mais il n’y pas que ça.

Seymour, immigré irakien, est marié à une immigrée néo-zélandaise, ces deux déracinés viennent d’avoir un enfant et la vie de jeunes parents est difficilement conciliable avec les strass et les rythmes de tournage. Le délitement amoureux de ce ménage semble inexorable et on a l’impression à la lecture alternée de ces deux tableaux – plateau de cinéma, cocon familial éclaté – de suivre un grand film réalisé par Paul Thomas Anderson, au découpage-montage cadencé et agité. Au beau milieu des péripéties de Seymour, une incursion d’une bonne trentaine de pages en couleurs retrace les splendeurs et misères d’un cow-boy parti de rien et arrivé presqu’au firmament, ce destin en accéléré comme une clé à l’histoire qui nous occupe.

Dans une sublime ligne claire en noir et blanc aux ombres sépia où les poses semblent à la fois figées et tellement incarnées, l’auteur nous invite à observer les grandeurs et décadences de tout un monde et le souffle de la vie qui exhale sans relâche.btn commande

Cornélius, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Eric Moreau, 35.50 €