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un monde sans rivage - gaudyL'avis d'Anouk:

Au départ, il y a des photos. Un petit trésor de photos prises en 1897 par Nils Strindberg lors d'une expédition en ballon vers le Pôle Nord. Strindberg et ses deux compagnons disparaissent tragiquement, et le mystère entourant cette disparition marque les esprits de la Belle Époque: recherches, enquêtes et folles rumeurs hantent durablement la Suède.


Trente-trois ans plus tard, on retrouve les corps des trois explorateurs, le journal tenu par Salomon Andrée, des lettres de Nils à sa fiancée et, miraculeusement préservés dans la glace, des rouleaux de  négatifs. Ils seront développés avec mille précautions et ces images miraculeusement sauvées des glaces feront le tour du monde.


Ces photos sont le point d'ancrage du livre d'Hélène Gaudy, fragiles empreintes qui lui font remonter le temps et s'enfoncer dans la profondeur blanche de l'Arctique. Les images sont comme «des paliers pour plonger en apnée, s'enfoncer, reprendre de l'air, s'arrimer aux détails, au minimum visible, et en passant de l'une à l'autre, jeter un regard aux gouffres qui les séparent, dont on ne perçoit qu'une rumeur, à peine un frémissement».


Le roman s'articule en fragments qui s'arriment à trois époques: le temps de l'expédition, le temps de l'exhumation des corps et de la découverte des images en 1930 et le présent de l'autrice. Cette écriture fragmentée fait écho à la mouvance du paysage polaire, où l'eau, la glace, la terre et le ciel se confondent et se transforment dans «la lumière trop forte qui révèle les détails avant de les noyer».


Magnifique méditation sur le temps et l'effacement, Un monde sans rivage rend aussi hommage,  dans le contexte si masculin d'une expédition polaire à la veille du 20e siècle, à une figure de femme libre et forte, Anna Charlier, éternelle fiancée de Nils Strindberg dont elle restitue les angoisses et le manque, le deuil impossible. Dans une langue poétique, qui varie les angles de vue et les perspectives, Hélène Gaudy rend vie et justice aux disparus autant qu'au paysage, et nous rappelle que la fascination pour l'Arctique renvoie chacun à cette «zone blanche qu'on porterait en soi comme une île».

Actes Sud, 21 €btn commande

poids plumes - malinconiL'avis d'Anouk:

Au début, il y a l'étonnement: un livre de Nicole Malinconi qui nous parle des oiseaux, quand tout son questionnement porte sur l'humain et ce qu'il recèle de plus secret, de plus enfoui, de plus retenu.

Et puis l'étonnement s'éloigne dès le premier texte lu – cette intranquillité, ce qui-vive, cette fragilité, c'est bien là le coeur de ce que Nicole Malinconi cherche à atteindre tout au long de son chemin d'écriture.


Observer les oiseaux et restituer leur façon d'être au monde et à la vie, c'est porter l'attention sur l'infiniment petit, c'est mettre des mots sur ce qui semble destiné à ne pas en avoir. C'est aussi  donner une forme à ce qui bouge et échappe. C'est un détour du regard pour apprendre à regarder mieux et à voir l'exceptionnel derrière la banalité. L'oiseau est l'incarnation de plus grand que lui: un paysage, la création, la vie. Dans les mots de Nicole Malinconi, l'insignifiance apparente des oiseaux est le miroir de notre propre fragilité. La menace de leur absence souligne les impasses de notre temps, et leur courage, leur obstination, leur ténacité sont comme des invitations à tenir et avancer.oiseaux2 crevecoeur

 

oiseaux1 crevecoeurLes textes qui s'égrènent au long de Poids Plumes sont doux et forts à la fois, marqués par une inconditionnelle et lucide bienveillance. Le conditionnel et le futur donnent chair à l'intranquillité, à la sensation de se tenir sur le fil. L'absence de communication entre celui qui regarde et celui qui est regardé n'empêche pas la relation. Et c'est là finalement ce qui semble nourrir chacun de ces textes subtils: tisser fil à fil notre relation à ce qui nous entoure – le monde, les êtres, les traces qu'ils laissent.

 

En écho aux mots de Nicole Malinconi, les délicates gravures sur gommes de Kikie Crêvecoeur sont un enchantement.

 

Esperluète, 15 €. À noter que la Revue Textyles consacre son dernier numéro à l'oeuvre de Nicole Malinconi; le dossier est coordonné par Laurent Demoulin et Pierre Piret.btn commande

blues marczewskiL'avis d'Anouk

"Liège, ville lumière! Liège, ville éternelle! Liège, ville qui ne dort jamais! Liège, Venise du Nord! Liège, Big Apple! Liège, perle de l'Orient! Liège, cité des anges! Liège, ville trois fois sainte! Liège, berceau de l'écriture! Liège, la Sublime Porte! Liège, The Mother City! Liège, la fiancée de la Méditerranée! Liège, la perle de l'Adriatique! Liège, la reine des plages et la plage des rois! Liège, capitale des Gaules! Liège, la porte du Midi! Liège!"

Dix textes comme autant d'invitations à marcher, rêver, penser avec et par Liège: voici ce que nous offre Philippe Marczewski dans ce premier livre  éminemment singulier. Un fleuve prisonnier, un passé rebelle, des héros et des sacrifiés: le livre charrie images d'aujourd'hui et mythologies éternelles. Et puis il y a la musique, envoûtante, omniprésente — dans l'écriture ample, dans les ombres de jazzmen oubliés, dans l'abandon et la mélancolie.

Éditions Inculte, 17.50 eurosbtn commande